Lorsque Jacques Audiard présente son dernier film Emilia Pérez, – enfin disponible au Maroc – réalisé en collaboration avec Anthony Vaccarello, une nouvelle page s’écrit dans l’histoire de la mode et du cinéma. Ce n’est plus simplement une question de costumes somptueux : la haute couture devient partie intégrante du processus narratif, grâce à l’œil visionnaire du directeur artistique de Saint Laurent. Avec ce film, Vaccarello ne se contente pas de dessiner des tenues ; il réalise, produit et impose une esthétique qui fusionne les arts visuels et la narration cinématographique… pour nous en mettre plein la vue !
Mode, amour et cinéma
La mode et le cinéma partagent une fascination commune : celle de raconter des histoires. Si les costumes des films ont souvent servi de toile de fond pour les plus grandes maisons de couture, ces dernières franchissent aujourd’hui un nouveau cap, transformant leur rôle de spectatrices en actrices majeures. En 2025, cette collaboration historique semble atteindre un sommet, où l’élégance de la haute couture habille les personnages les plus iconiques tout en s’invitant dans les crédits des productions.
Le cinéma a toujours été une scène privilégiée pour la haute couture. De Marilyn Monroe enveloppée dans les créations de Jean-Louis dans Les Hommes préfèrent les blondes (1953) à Audrey Hepburn sublimée par Hubert de Givenchy dans Breakfast at Tiffany’s (1961), les maisons de couture ont marqué l’histoire du septième art.
Plus récemment, Prada a réinventé l’éclat des années folles avec les costumes de The Great Gatsby (2013), réalisé par Baz Luhrmann, tandis que Chanel, sous l’œil artistique de Karl Lagerfeld, a réussi à élever le costume à un statut d’œuvre d’art. Et…qui pourrait oublier la décadence élégante de Marie-Antoinette (2006) de Sofia Coppola, enrichie par les créations de Lagerfeld ?
Cette tradition se poursuit avec des productions telles que Haute Couture (2021), où la Maison Dior offre une plongée réaliste dans ses ateliers, et House of Gucci (2021), où la Maison Gucci contribue à une reconstitution minutieuse de son héritage. Le film, réalisé par Ridley Scott, a bénéficié d’un accès complet aux archives Gucci, mettant en scène des accessoires et costumes à la hauteur du drame qu’il relate.
Quand Saint Laurent fait son cinéma
À gauche Pédro Almodovar et à droite David Cronenberg qui ont rejoint la Team Saint-Laurent Productions.
En 2022, Saint Laurent Productions bouscule tout sur son passage et devient la première maison de couture à lancer sa propre société de production cinématographique. Un coup de génie signé Anthony Vaccarello, le maestro de la maison, qui semble avoir une mission bien claire : faire exploser les frontières créatives. Oubliez les podiums, le luxe se joue désormais sur grand écran.
Premier acte avec Emilia Pérez une comédie musicale signée Jacques Audiard où Vaccarello ne fait pas que produire, il habille aussi. Et pas juste pour le plaisir de dire « C’est du Saint Laurent » : ici, la couture devient un personnage à part entière, prête à voler la vedette. C’est ça, le twist : transformer des vêtements en émotions, des étoffes en narration. Qui aurait cru que la haute couture avait un flair aussi aiguisé pour le 7ᵉ art ?
Mais Vaccarello n’en reste pas là. Avec The Shrouds de David Cronenberg, Saint Laurent Productions monte en puissance. Des films ? Deux à trois par an, avec un casting de réalisateurs qui ferait rougir n’importe quel festival : Wong Kar-wai, Jim Jarmusch, Abel Ferrara… Même Gaspar Noé et Paolo Sorrentino ont dit « oui ». Vaccarello apporte son esthétique affûtée, mais c’est aussi un pari sur l’avenir : la maison compte repérer et soutenir des talents émergents. Visionnaire, vous dites ?
Ce qui frappe, c’est cette capacité à brouiller les frontières. On parle de mode, de cinéma, mais en réalité, Saint Laurent raconte des histoires. L’élégance rencontre l’émotion, le luxe se déploie là où on ne l’attend pas. Les premières œuvres de cette révolution seront dévoilées dans des festivals prestigieux, comme Cannes, parce que oui, rien n’est trop beau pour faire sensation.
La question reste : que cherche vraiment Saint Laurent ? À redéfinir l’idée même du luxe, évidemment. Finis les clichés de la haute couture confinée dans des défilés hors de prix. Ici, le message est clair : le futur du chic s’écrira dans les salles obscures. Et franchement, qui s’en plaindrait ?