MOB WIFE. Définition : « le Mob Wife est une tendance qui s’inspire du look de la mafia. À la fois sexy et audacieux, ce look incarne l’archétype parfait de la mafiosa. Tenue bling-bling et maquillage osé, tout est fait pour mettre en valeur vos atouts pour un effet femme fatale garanti. » Sur Google, c’est une définition plutôt sobre. Pour le public, la Mob Wife est aussi l’incarnation de la féminité frondeuse. Comme le dit souvent ma nièce « C’est lunaire ! » Je pense sincèrement qu’elle a raison. Décryptage.
Mob Wife, une tendance dites-vous ?
Me faire huer par toutes les consoeurs de l’autre rive de la Méditerranée ? J’assume. Je plaide d’ores et déjà coupable mais pour la bonne cause. Celle des vraies femmes. De Fatima Mernissi à Simone de Beauvoir en passant notre plus légendaire féministe : Feu Aïcha Ech Chenna et tant d’autres qui se joindraient à nous pour observer d’un œil d’entomologiste dépité, le concept presque déjà obsolète de la Mob Wife. Un phénomène qui fait vendre évidemment : fourrures, clinquant et manières douteuses sont l’apanage de la dite « femme de Mafieux ». Parce qu’en anglais, « Mob wife » ça peut éventuellement passer. Ça passe « crème » comme disent les Gen-Z. « Mob Wife », c’est court, ça se retient instantanément et ça claque. Quand je le dis en français, j’ai déjà plutôt mauvaise conscience. Et je classe définitivement « Méritocratie » dans le Dictionnaire Critique de l’Utopie au Temps des Lumières. J’ai beau me répéter que derrière chaque homme, il y a une grande femme, j’ai le cœur qui bat un peu plus vite lorsque que je repense à Sonny Corléone qui tabasse violemment sa femme enceinte dans Le Parrain de Coppola. Je revois la sublime et troublante Sharon Stone Dans Casino. Ada et Minna Everleigh – les impératrices du vice – Bonnie Parker, etc. Des personnages ancrées dans la mémoire collective. Des baisers de cinéma mortels. Mais… sur un podium, dans la rue et sur Tik Tok, vous imaginez ? C’est le défilé de trop ! La suprématie du vulgaire et du ridicule. On est bien loin de Virginia Hill ou de Michelle Pfeiffer, l’épouse venimeuse de Tony Montana dans Scarface. Au cinéma, ces femmes-là crèvent évidemment l’écran. Mais en ligne… la Mob Wife virtuelle, ce n’est même pas l’entrée de gamme de la star américaine. C’est la pizza commandée sur le pouce qui arrive froide. Une sorte de Fast-Mafiosa qui a pourtant déjà fait plus de 148 millions de vues sur le net.
Verdict ? La Mob Wife fracasse des décennies de militantisme positif pour nous reléguer à des néo-libéralistes décomplexées qui aiment le pouvoir et l’argent facile des escrocs. Oui, la Mob Wife fait la Une ! Mêmes les stars se prennent au jeu et dépensent des millions pour s’encanailler. C’est dément.
And the winner is … la Mob Wife du Printemp- Été 2024
Son style est assez curieux finalement. Quelquefois même bancal. On ne sait jamais vraiment dans quel bestiaire la placer. Trop de fourrures, on pense évidemment femme fatale, femme d’une nuit, jarretelles et pic à glace. Restons courtois. Les lèvres laquées ultra-botoxées, on est dans une esthétique des plus banales. Ce n’est qu’une campagne de plus pour de la cosmétique d’avant-garde. Le dress code de la Mob Wife n’est pas si simple à délimiter. Total look léopard ? Blouse transparente en résille et cuissardes à talons ? Accessoires ou quincaillerie ? Je suis perplexe et un rien paumée. Dans d’autres contrées, où les écologistes crient au scandale parce que la fourrure revient sur le devant de la scène, je frémis intérieurement à la simple idée de croiser une marocaine moderne Mob Wife en allant faire les courses. Parce que le Blingbling ou le clinquant, nous pourrions largement en faire des écoles de style dans certaines de nos grandes villes chéries.
Micro-tendance, macro dégât ?
Ce qui est certain, c’est que la tendance Old luxury qui prônait le cachemire douillet, le mocassin Tod’s et la montre vintage Cartier de Mamie est provisoirement plaquée au sol. Exit l’élégance, la sobriété, la mode intemporelle. Quant aux répercussions sociales… La Mob Wife, c’est peut-être la méchante marraine des Séphora kids. Effrontée, vulgaire en chef et parvenue, elle torpille sur les réseaux et décourage certaines pré-adolescentes de trouver du sens aux cours particuliers de mathématiques. Et leurs mères de se « contenter » d’un honnête mari légèrement bedonnant qui s’endort sur le canapé avant la fin du film. Faut-il suivre ces nouvelles icones Tiktokables jour et nuit ?
Non. Par essence non. Parce que « la mode passe » et que « le style reste » disait Gabrielle Chanel. Parce qu’on louche vraiment devant l’imprimé léopard qui a même finit par envahir nos salles de bain et les Jellabas polaires depuis quelques hivers. Et que l’on finit par se gratter nerveusement en portant de la fausse fourrure. Et qu’aucune Mob wife n’est à l’abri d’oublier ses faux-cils magnétiques pour une plage déserte avec trois paréos et une paire de tongs. J’aimerais me dire qu’il y a toujours une clean-girl qui sommeille dans le cœur et la garde-robe d’une Mob Wife. Vous le croyez aussi. C’est déjà ça !